2ème Partie : Comment faire avec nos émotions?

 

C’est toute la question… Nous ne sommes pas habitués à les écouter et s’y retrouver confronté du jour au lendemain, parce que la situation nous oblige à une pause ou que nos contraintes sont, au contraire, démultipliées, n’est pas des plus aisé…

Dans l’idéal, nous serions en mesure de laisser être l’émotion sans la réprimer, de reconnaitre sa présence, de l’accepter pour ce qu’elle est, de nous laisser traverser en nous abstenant de vouloir éviter/contrôler/gérer et de mettre en œuvre dans la foulée ce qu’il faut pour répondre au besoin que nous avons, bien sûr, identifié du premier coup… Ça c’est dans l’idéal! Mais c’est souvent plus facile à dire qu’à faire et en ces temps de charge émotionnelle intense, parfois ça déborde. Du coup comment faire face au trop plein et que mettre en place pour vivre avec nos émotions plus sereinement?

 

 

Quand nous sommes sur le point de déborder ou que nous nous sentons envahis

 

Quand nos émotions nous submergent, nous avons tendance à perdre pied, à nous couper de la réalité et à nous retrouver incapable d’adopter un comportement approprié à la situation.
Dans ce cas là, il est important de rester lié au monde qui nous entoure en adoptant des stratégies à la fois mentales et physiques. Première chose à faire : respirer! Profondément. Et en focalisant notre pensée sur la respiration. Nous pouvons aussi mettre en place des actions simples pour nous recentrer sur nos sens (toucher une surface froide, porter notre attention sur un bruit extérieur…). L’idée ici est de détacher notre attention de l’émotion et de prendre de la distance pour revenir dans le moment présent. En faisant un pas de côté, nous diminuons la tension et sortons de nos automatismes émotionnels.

Si nous sentons que notre colère est sur le point d’exploser par exemple, nous pouvons différer le moment de l’exprimer en prenant du temps avant de parler. Nous pouvons laisser passer plusieurs grandes respirations ou, si nous en sommes capables, changer de pièce. Si nous avons une grande maitrise de nous-même, nous pouvons aussi écrire une lettre de colère qui ne sera pas envoyée et dans laquelle nous ne nous censurerons pas (il vaut mieux quand même ne pas oublier de la détruire juste après…). L’écriture permet de diminuer la charge émotionnelle et aide à prendre du recul et ça fonctionne avec toutes les émotions…

Les émotions ont ceci de particulier qu’elles sont contagieuses et qu’elles agissent comme des lunettes qui teintent tout ce que nous percevons ou ressentons. Quand nous nous laissons envahir par une émotion quelle qu’elle soit, nos pensées tournent en boucle.
Lorsque nous sommes déprimés par exemple, notre cerveau va avoir tendance à sélectionner les informations qui lui permettront de justifier notre état du moment. Entre le verre à moitié plein et le verre à moitié vide, nous choisirons donc systématiquement le second, ce qui nous donnera, une fois de plus, la confirmation que rien ne va dans le monde… Et ainsi de suite! Nous avons la capacité de nous donner systématiquement raison, la vie est quand même très bien faite.

Afin de limiter l’envahissement par l’émotion, il est important de commencer par accepter sa présence puis par la reconnaitre.
Si nous acceptons l’émotion dès son apparition, que nous lui laissons de la place voir que nous arrivons à nous en détacher suffisamment pour l’observer, elle redevient une simple partie de nous et plus cet envahisseur omniprésent. La reconnaitre et mettre des mots dessus nous permet ensuite de prendre de la distance. ll est aussi plus facile de faire face à quelque chose que nous avons clairement identifié. Quand je suis en colère par exemple, mon dialogue intérieur pourrait ressembler à peu près à ça : “Ok, je suis en colère. Pourquoi suis-je en colère? Qu’est-ce que la situation a réveillé en moi? De quoi ai-je besoin là tout de suite?”. Pour l’avoir testé de nombreuses fois, je me suis rendue compte que cette solution avait aussi le mérite de me permettre de me calmer plus rapidement et de m’éviter l’effet cocotte-minute!

Une fois l’émotion acceptée et reconnue, nous pouvons observer ce qu’elle fait naitre en nous : les signes physiques bien entendu mais aussi les pensées. Cela nous permet de séparer ce qui nous appartient réellement de ce qui n’est qu’une conséquence de l’émotion. Nous pouvons ainsi la confronter à la réalité et évaluer ce que nous sommes en mesure de contrôler et ce sur quoi nous avons un pouvoir de changement.
Dans le cas de la peur, ou de l’une de ses formes dérivées l’angoisse, les signes physiques sont souvent clairs. Les pensées, par contre, peuvent être plus difficiles à cerner tant la peur contamine tout sur son passage… Prenons un exemple récent : les ruées dans les supermarchés auxquelles nous avons assisté au début du confinement. Nous n’étions pas en situation de pénurie, les magasins étaient réapprovisionnés et les messages officiels étaient clairs. Le fait de faire des stock de pâtes ou de papier toilette n’était donc pas rationnel. Pourtant les personnes interrogées étaient persuadées d’agir de manière raisonnable pour se protéger. Leur peur avait pris le pouvoir.
Quand nous sommes envahis par la peur, et si elle n’est pas, évidemment, déclenchée par un danger immédiat et réel pour notre intégrité physique, nous avons besoin de la remettre à sa place afin de retrouver notre liberté et de pouvoir mobiliser à nouveau pleinement nos capacités. Pour se faire, nous pouvons commencer par nous poser des questions afin de confronter nos pensées avec la réalité : Que se passe-t-il ici et maintenant? Suis-je en danger immédiat? Qu’est-ce que je sais de manière irréfutable? Comment puis-je, le cas échéant, obtenir des informations fiables? Qu’est-ce qui dépend de moi dans cette situation? Ai-je le pouvoir de changer quelque chose? Répondre à ces questions permet généralement de circonscrire l’émotion et de relativiser.

 

 

Et au quotidien, on fait comment?

 

Suite à mon récent épisode de débordement, j’ai compris que ce dont j’avais vraiment besoin c’était de prendre soin de moi et de me sentir appartenir à quelque chose de plus grand. Voici donc ce que j’ai mis en place pour essayer de vivre plus sereinement avec mes émotions en ce temps de confinement. Encore une fois nous sommes tous différents et nous avons chacun nos propres réponses, n’hésitez pas à chercher les vôtres…

Je n’alimente pas le stress et j’évite de ressasser ou de me projeter dans un avenir incertain. Bref je vis dans le présent. Ce qui se traduit concrètement par moins d’écrans, des informations mais en quantité limitée et en privilégiant des sources fiables et ne m’inquiéter que pour des choses qui dépendent réellement de moi. Il ne s’agit pas de fuir la réalité mais de ne pas nourrir l’anxiété et de concentrer mon énergie sur des choses sur lesquelles je peux agir concrètement (et comme, bien que je le regrette amèrement, je ne sais ni changer le passé, ni prévoir le futur…).

Je me concentre sur ce qui me fait du bien et je prends du temps pour moi : partager en écrivant, bouger (marcher, danser…), écouter de la musique ou les oiseaux chanter depuis mon balcon, profiter du silence, faire des pauses quand je travaille, communiquer avec mes proches…

Je pose des limites. La communication c’est bien mais ça peut parfois être fatigant! Il est important de savoir respecter ses limites et de ne pas gaspiller son énergie. En pratique, ça veut dire par exemple apprendre à dire non à un énième apéro WhatsApp si on se sent fatigué, rappeler les gens à un moment qui nous convient ou savoir garder de la distance avec les états d’âme de nos proches et ne pas chercher systématiquement des solutions à leur place.

Je retrouve du pouvoir sur ma vie en passant à l’action. Le confinement nous a fait perdre beaucoup de pouvoir en restreignant nos libertés, nos choix et même notre capacité à nous projeter, j’ai donc décidé d’en retrouver un peu. Pas en me forçant ou en me submergeant de choses à faire mais en me fixant des objectifs réalistes (voir l’épisode 1). Ça me maintient occupée et en plus j’en tire de la satisfaction… Que demande le peuple!

Je me connecte à ce qui donne du sens et à mes valeurs. Même si c’est parfois pénible, rester chez moi, respecter le confinement a du sens à la fois à un niveau personnel, pour me protéger, et à un niveau plus global, pour protéger les autres et en finir au plus vite. La solidarité que nous voyons émerger un peu partout a aussi du sens pour moi. Si j’aimerais pouvoir faire plus, partager avec mes clients, avec ceux qui me lisent, prendre des nouvelles de mes proches, faire quelques courses pour mes voisins, sont de petites actions qui me font du bien.

J’entraine mon cerveau à voir le positif. Je note mentalement au moins trois choses positives de ma journée. Quand je sors, je souris aux gens dans la rue. Je suis reconnaissante pour ce que j’ai. Je me réjouis de vivre à un endroit où le soleil brille souvent. C’est peu de chose mais la joie est une émotion comme les autres et possède le même pouvoir de contamination… Entrainer son cerveau à voir le positif, c’est déjà entrer dans une spirale positive. Et aujourd’hui, nous en avons bien besoin!

Dernière chose, je m’accorde le droit d’avoir des moments où je n’ai pas envie, des moments où je suis triste ou en colère. Dans ces cas là, je lis un livre ou je mets un film qui me fait du bien, je cuisine ce dont j’ai envie (oui même si ça veut dire prendre un petit déjeuner à l’heure du diner…), je prends soin de moi et… C’est tout! Ah si, j’évacue aussi. Je pleure, je me défoule, je crie (bon ok crier c’est très libérateur mais en période de confinement, sauf si vous êtes isolé, ce n’est peut-être pas une bonne idée…). Avoir des coups de mou c’est absolument normal, ce qui serait étonnant aujourd’hui, c’est de n’en avoir aucun…

Faire face à ses émotions ce n’est pas de tout repos. Parfois c’est douloureux, parfois c’est exaltant, parfois c’est juste inconfortable… Quand nous nous sentons débordé, il est important de garder en tête qu’une émotion ne dure pas, qu’elle est toujours passagère. Elle peut nous déstabiliser, nous ébranler, nous rendre vulnérable mais nous sommes tous soumis à ce mouvement incessant et naturel. Rappelons-nous aussi que nous avons le pouvoir de faire face, que nous sommes capables de nous adapter comme le roseau de la fable de La Fontaine qui plie sous le vent mais mais ne rompt pas. Ne nous sous-estimons pas et écoutons nous. Si la période que nous vivons nous oblige à nous pencher un peu plus que d’habitude sur nos émotions et bien peut-être que nous en apprendrons quelque chose. Et c’est tant mieux…

Prenons soin de nous et, encore une fois, n’hésitons pas à demander de l’aide si nous sentons que nous perdons pied que ce soit à des parents, des amis ou un professionnel. Parler, s’exprimer est vital, c’est le premier pas sur le chemin du soulagement…

 

A venir l’épisode 3 : Et si nous apprenions quelque chose de tout ça…

Retrouvez la première partie ici : Les émotions sont nos amies. Si si.